Ulysse et Néoptolème enlèvent à Philoctète l'arc et les flèches d'Heraclès de François-Xavier Fabre

Lord Bristol passe commande à Fabre de cette œuvre ambitieuse dont le sujet est en vogue au XVIIIe siècle, la tragédie antique de Sophocle ayant été traduite par Vittorio Alfieri, ami de Fabre.

En route pour attaquer la ville de Troie, Philoctète est abandonné sur l’île de Lemnos à cause de la puanteur d’une plaie causée par la morsure d’un serpent. Il parvient à survivre grâce à l’arc et les flèches d’Héraclès qui ne manquent jamais leur cible. Mais, selon une prophétie, la victoire des Grecs sur les Troyens ne pouvait être effective qu’à l’aide de ces flèches. Ulysse, de retour sur l’île avec le fils d’Achille, Néoptolème, tente de convaincre ce dernier de s’emparer des armes par ruse. Le jeune guerrier gagne la confiance de Philoctète qui lui remet l’arc et les flèches. Surgit alors Ulysse qui entraîne Néoptolème à reprendre le chemin vers Troie. C’est ce moment là que Fabre a choisi de représenter, le moment le plus dramatique où Philoctète se rend compte qu’il a été trompé et qu’il n’a dorénavant plus d’armes pour se protéger.

Plusieurs études préparatoires montrent le soin avec lequel Fabre a composé l’œuvre. Le dessin préparatoire d’ensemble montre la frise des personnages nus dans des positions très proches de l’œuvre finale. Par contre, dans l’esquisse préparatoire à l’huile, on voit que Fabre a hésité à propos de la position de Philoctète qui est en train de se lever, surpris de la ruse dont il vient d’être victime. De la même façon, l’attitude de Néoptolème est accentuée dans le tableau final : on le sent loyal et résolument peiné du sort qui est fait à Philoctète. La composition est plus dynamique avec un point de fuite sur la gauche alors que dans l’esquisse la composition en frise était davantage statique.
Autre détail intéressant : le rapace mort placé devant Philoctète dans le tableau final était au sol derrière lui dans l’esquisse peinte. Témoignant du soin apporté par Fabre à ces détails réalistes, ce grand duc baigné de sang a fait l’objet d’une étude peinte indépendante. La facture nerveuse de l’esquisse laisse place à une exécution soignée, lisse et consciencieuse qui fige un peu l’action et la tension dramatique.

Le Philoctète constitue l’effort le plus louable de Fabre pour se mesurer avec la grande peinture d’histoire davidienne qui triomphe à Paris dans ces années-là. Après être passé dans diverses mains de collectionneurs privés, « l’énorme Philoctète » de l’expression même de Fabre, est acheté en 1826 par l’Etat français. En 2006, le musée du Louvre dépose le tableau à Montpellier, le processus d’élaboration de cette œuvre (études, esquisses, tableau final) peut désormais être appréhendé dans son ensemble au musée Fabre de Montpellier Agglomération.

François-Xavier Fabre (Montpellier, 1766 - 1837)
Ulysse et Néoptolème enlèvent à Philoctète l'arc et les flèches d'Hercule
1800
Huile sur toile
H. 289 ; L. 453 cm

S.D.b.g. : F.X. Fabre faciebat Florentiae 1800

Inv. D2007.7.1

Hist.: 1800, exécuté pour Lord Bristol ; 1808, acheté à Rome par le comte de Miatlev ; novembre 1809 (n° 177), puis 24 mars 1810 (n° 259), mis en vente à Paris chez Lebrun et retiré à la seconde vente ; 5-6 avril 1811, vendu chez Lebrun (n° 225) ; collection Scitivaux; 1826, acquis par l'État français à la vente Scitivaux pour 4000 francs ; dépôt du musée du Louvre, 2007.