Ferdinand Bury, Secrétaire à cylindre

Le secrétaire à cylindre de l’ébéniste Ferdinand Bury est une pièce maîtresse du Cabinet de travail qui clôt le parcours de l’Hôtel de Cabrières-Sabatier d’Espeyran. Il est un meuble emblématique du style néoclassique, dit « à la grecque », de la fin de l’Ancien Régime. Ses formes rectilignes et raffinées rendent sensible le retour à la rigueur antique. Le meuble, plaqué en bois de rose, appuie ses lignes sur une stricte architecture géométrique, reposant sur quatre pieds fuselés marquetés de cannelures figurées en buis et ébène. Les bronzes dorés d’applique sont un élément primordial d’ornementation du mobilier de la fin du XVIIIe siècle. Ils s’inspirent d’un répertoire décoratif emprunté à l’Antiquité comme les filets de perles, les rais de cœur, les oves ou les palmettes.

Le secrétaire est composé d’un abattant à cylindre qu’il suffit de faire coulisser vers l’arrière, à l’intérieur du corps du meuble, pour découvrir la table à écrire et le serre-papiers. La ceinture du meuble ouvre à trois tiroirs en façade. Un simple décor de frisage orne le médaillon sur le quart de cylindre, créant un jeu en damier, et sur le gradin composé d’un rang de trois tiroirs marquetés d’une frise en chevrons.

Les meubles comportant un plan à écrire fermé à clef se diversifièrent dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle. Ils révèlent les besoins nouveaux en matière de meubles à usage intime liés à l’activité épistolaire. On imagina alors un secrétaire qui, se fermant tout d’une pièce, puisse abriter en un instant tous les papiers épars : notes, correspondances, des mains indiscrètes. Le secrétaire à cylindre vit le jour vers 1750.

Chef d’œuvre capital de l’ébénisterie du XVIIIe siècle, le secrétaire à cylindre, dit « Le Bureau du roi » (1760-1769), demandé par Louis XV à J. F. Oeben et construit par J. H. Riesener, exposé au château de Versailles, contribua à fixer le modèle. Les exemplaires se multiplièrent et, avec eux, les variantes : secrétaire d’homme, destiné aux plus luxueux cabinets, secrétaire de dame, aux proportions plus réduites, pour être placé dans les plus élégants boudoirs.

Mais la construction du secrétaire à cylindre fut toujours coûteuse. Elle exige, pour que le cylindre fonctionne sans effort, l’emploi de bois de première qualité, ainsi qu’une exactitude dans le tracé et l’exécution des rainures. Rapidement, l’agencement fut simplifié en substituant aux lattes mouvantes commandées par une manivelle, un quart de cylindre rigide. Le nouveau procédé serait apparu vers 1770-1780.

Le secrétaire à cylindre fut d’un usage courant sous Louis XVI comme en témoigne les créations de Ferdinand Bury. L’ébéniste, reçu maître en 1774, exerça rue de Charonne à Paris jusqu’en 1789, année où il fit faillite. Il fabriqua également des commodes à ressaut et des meubles de fantaisies, tels que tables mécaniques, guéridons à crémaillère, tricoteuses, jardinières ou coffres à secrets.
Au-delà de la qualité exceptionnelle de la réalisation du secrétaire de la collection Sabatier d’Espeyran, la marque de la jurande des menuisiers – ébénistes « JME », frappée sous la traverse de ceinture, confirme l’origine parisienne du meuble.

Isabelle Groux de Mieri

Ferdinand Bury ( ?, 1740 – Paris, 1795), maître le 27 juillet 1774
Secrétaire à cylindre
Fin du XVIIIe siècle
Chêne, bois de rose, bois de violette, buis, ébène, bronze doré.
H. 111,5 ; L. 113,5 ; P. 60,5 cm

Marques : F. BURY JME (sous traverse ceinture gauche)

Inv. 68.2.74

Hist.: Legs Sabatier d’Espeyran, 1967.